Petit livre-objet singulier, cet opus des éditions BnF (collection L’Œil curieux) nous plonge dans l’univers de la haute couture française entre le Second Empire et les années 40. Photographiées à la volée par les frères Séeberger sous l’angle du luxe et, souvent, de l’humour, des élégantes mettent en scène les créations des grands couturiers : Worth, Doucet, Lanvin, Poiret, Chanel, Patou…
Si les frères Séeberger sont bien connus pour leurs clichés du Paris d’avant 1914, leur activité comme photographes de mode n’avait guère été mise en valeur jusqu’ici. Reflet de la mode et des mondanités d’une époque, miroir de la haute société, les images présentées dans ce livre font partie d’un trésor de trente-cinq mille clichés réalisés entre 1909 et 1939, que la Bibliothèque nationale de France a acquis en 1975. Jules (1872-1932), Louis (1874-1946) et Henri (1876-1956) Séeberger s’orientent en premier lieu vers le dessin industriel. A partir de 1903, Jules se lance dans la photographie en réalisant des séries de reportages sur Montmartre, entraînant bientôt ses frères à sa suite. Ils fondent un atelier familial qui fonctionnera pendant près de 70 ans. L’essor commercial de la carte postale assure un important débouché à leurs paysages et tableaux urbains et leur forge une réputation. En 1909, la revue La Mode pratique leur commande des photographies des femmes élégantes sur les champs de courses et l’allée des Acacias au Bois de Boulogne. C’est là que se lancent les nouvelles modes qui passionnent les lectrices, là qu’évoluent celles qui donnent le ton en élisant les dernières créations des grands couturiers. D’autres magazines leur passent bientôt commande à leur tour et, sans que cela devienne une activité exclusive, les Séeberger se créent une spécialité dans le reportage de mode où ils excellent très vite. Quittant les champs de courses et le Bois de Boulogne, ils se rendent dès les années 1920 dans les villégiatures à la mode, lieux de rendez-vous de la haute société cosmopolite : Cannes au printemps, Deauville en juillet et en août, Biarritz en septembre, Saint-Moritz en décembre et en janvier. Plusieurs dizaines de reportages sont réalisés chaque année pour être publiés dans des revues comme Jardin des Modes, Vu, Fémina, Vogue… La caractéristique de cette œuvre collective est d’être réalisée uniquement en extérieurs : les maisons de couture envoient au moment des collections quelques mannequins vêtus des nouveautés pour se mêler à la foule élégante, mais la plupart des modèles sont les clientes des grands couturiers. Au-delà de la mode proprement dite, les Séeberger saisissent l’effervescence des événements mondains et photographient le monde brillant où les beautés anonymes croisent les actrices, les banquiers, les couturiers et les aristocrates. Citons par exemple Mistinguett, Arletty, Charlie Chaplin, Marlène Dietrich, Joséphine Baker, Tino Rossi, Gabrielle Chanel, Elsa Schiaparelli, Jean Patou, Paul Poiret, Marcel Rochas, Mme Agnès, Van Dongen, la famille Citroën, l’Aga Khan et la Bégum…. Jules Séeberger, malade, se retire en 1926 mais ses deux frères, Louis et Henri poursuivent leur activité jusqu’en 1939. Les deux fils de Louis, Jean et Albert, deviennent assistants en 1927 et 1930 et poursuivent l’activité de l’atelier jusqu’en 1975. Un trésor d’images réalisées entre 1909 et 1939 demeurera. Élégantes
– Fashion week BnF Éditions, Collection L’Œil curieux 6.90 euros http://editions.bnf.fr/
Bravo et merci pour cet article. Espérons que les magnifiques photos de mode de la seconde génération (Jean et Albert Séeberger) seront elles aussi prochainement mises à l’honneur.
merci à toi fred.
Magnifique ! Quelle époque d’élégance dans le travail et dans la pose !